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Yann Ritter revient sur ce grand classique de la littérature adapté au cinéma: Le Festin Nu
Bon autant vous dire que pour notre film du jour, il nous faudra à vous comme à moi une bonne dose de recul (… et de LSD accessoirement) pour piger un broc de ce mic mac psychédélique, Le Festin Nu étant ce qu’on peut appeler un gros, un très gros trip multifacette et un objet filmique inattendu…
LE ROMAN D'ABORD
Le Festin Nu est à l’origine un roman de William Burroughs, qu’il écrivit entre 1954 et 1957 à Tanger sous l’influence de diverses substances hallucinogènes et sous coke (ce qui est en soit un exploit). Le résultat est une œuvre dispersée obscène et informe mais saluée par la critique et le public dès sa publication… en France. Aux Etats-Unis le livre fut interdit pour 10 ans tant il choquait les mœurs par son évocation crue de l’homosexualité.
LE FILM ENSUITE
Par son manque de cohérence et d’une forme classique le roman fut très vite classé dans la catégorie inadaptable. Mais un homme, qui présentait Burroughs comme une de ses inspirations premières tenta le pari. Cet homme c’est David Cronenberg, qui à l’époque avait déjà réalisé une dizaine films, dont le culte La Mouche et le dérangeant Vidéodrome entre autre, qui avait fait de lui un cinéaste reconnu autant par le public que par la critique. 
Mais l’adaptation du roman de Burroughs est un dĂ©fi de taille pour le canadien qui dĂ©cide d’ajouter aux Ă©lĂ©ments qu’il prend au roman une Ă©vocation de la biographie de son auteur. C’est ainsi que William « Bill Â» Lee assassine sa femme en jouant Ă  Guillaume Tell de la mĂŞme manière que Burroughs. De mĂŞme l’Interzone oĂą Lee pense se trouver dans son dĂ©lire est une Ă©vocation de l’International Zone de Tanger oĂą il Ă©crivit le roman. 
« Il semble que j'ai enregistrĂ© mes impressions sur ce mal et son dĂ©lire….. le Festin Nu cet instant pĂ©trifiĂ© et glacĂ© oĂą chacun peut voir ce qui est piquĂ© au bout de chaque fourchette. Â»
L'HISTOIRE
Alors ce film, on commence par quoi ? … Ah oui William Lee est un ancien junkie reconverti dans l’extermination de cafards, (jusque-lĂ  vous alleZ me dire tout va bien mais …) sa femme lui vole son produit pour se…. l’injecter. Bien dĂ©cidĂ© Ă  garder son boulot et Ă  aider sa femme, il dĂ©cide d’aller Ă  la rencontre d’un mĂ©decin spĂ©cialisĂ© dans ce genre de cas.
Vous suivez ? Bon alors on revient en arrière. Bill Lee est arrĂŞtĂ© par deux policiers des stups qui le soupçonnent de trafiquer de la poudre, ils le mettent en face d’un cafard gĂ©ant (oui, oui) qui lui rĂ©vèle que sa femme est une espionne et qui plus est non humaine et qu’il faut absolument la tuer. Une fois fait il devra se rendre dans un port franc de la cote nord-africaine appelĂ© l’Interzone, oĂą il devra faire son rapport et enquĂŞter sur diffĂ©rents personnages locaux tout en se faisant passer pour homosexuel. Vous ne me croyez pas ? Et pourtant….
LE CASTING
Peter Weller, qui refusa de reprendre une troisième fois son rĂ´le fĂ©tiche de Robocop pour jouer dans le film de Cronenberg, livre une performance Ă©tonnante. Il ralentit sa diction et son jeu pour rentrer dans son personnage constamment surpris et dĂ©sabusĂ© par son propre dĂ©lire. Ne comprenant pas toujours oĂą il se trouve et ce qu’il fait parfois touchant d’autre fois franchement dĂ©routant Weller intègre parfaitement les sentiments de ce personnage si atypique.
« L'orgasme ne joue aucun rĂ´le dans la vie du droguĂ©. …. le sablier de la came s'est vidĂ©. Â»
EN CONCLUSION
Le Festin Nu est un film singulier et pluriel à la fois. Un trip artistique, organique, sexuel de drogue (bien sûr) et même littéraire, jamais un film n’aura aussi bien compris la démarche de l’écriture et de la pensée littéraire. Un film où le...